un métier: cheminot

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Re: un métier: cheminot

Messagepar François D
16 Juil 2014, 23:44

Sacré boulot les écorchés.
Pour les couleurs, on dirait un mélange de Rotring/lavis à moins que ce soit des gouaches et du feutre ?
"C'est tellement bas que ça me passe bien au dessus !"
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François D
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Re: un métier: cheminot

Messagepar Undertaker
17 Juil 2014, 08:32

Bonjour,

1981 est aussi l’année de la mise en service du TGV PSE. Malgré tout, on peut dire que l’entrée en scène d’un tel programme innovant est réussie. Dès le début de 1982, le Directeur Général (Jean Dupuy) ne veut plus de ce TGV qui marche bien, mais qui vibre. Alors, la rame PSE 10, celle des précédents essais, nous est à nouveau affectée pour une nouvelle campagne d’essais avec pour objectif de rendre enfin ces TGV confortables. Nous étions deux dessinateurs : mon collègue (Fabrice Paillat) aux bogies et moi aux caisses, appuyés par les experts des différents organes constitutifs des assemblages. A ce stade, nous ne travaillons que sur les bogies porteurs articulés, les bogies moteurs des remorques extrêmes restant sur suspension métallique, qui n’est d’ailleurs, pour l’instant, pas la plus mauvaise. Durant 18 mois, nous travaillons de concert à concevoir, à dessiner, à suivre la fabrication, le montage et les essais en ligne. Tout ceci dans une réelle osmose car nous nous entendons à merveille, nos relations professionnelles étant d’autant facilitées que nous habitons à 500 m l’un de l’autre et qu’à nos moments perdus nous pratiquons l’aéromodélisme. Ce sont les ateliers de Bischheim qui confectionnent et montent les assemblages. Je dirais que nous avions un budget sans compter : il fallait que ça marche, quel qu’en soit le prix ! A la fin, les comptes ont tout de même été faits : le prix d’une rame TGV* ! Une fois le but atteint, François Lacôte (surement le plus technicien de tous les grands ingénieurs que j’aie pu côtoyer) souhaite adapter aussi une suspension pneumatique aux bogies extrêmes : ce ne peut qu’être meilleur pour le TGV PSE, mais aussi, il a en poche une solution pour les bogies extrêmes du futur TGV A.
* ce chiffre brut peut sembler élevé : mais ramené à quelques 700 TGV circulant dans le monde, ce n’est vraiment pas grand-chose.

Puis, une fois cette suspension mise au point, nous constituerons une équipe bien plus étoffée pour réaliser tous les dessins d’ensemble et de détails pour ce que nous appelions "l’industrialisation de la suspension". Bien que nos montages d’essais respectaient les règles de l’art de la construction ferroviaire, il est bien évident que nos solutions n’étaient pas toujours "industrielles". Nous avons constitué une équipe de cinq dessinateurs pour les parties caisses (toutes remorques confondues) et trois dessinateurs pour les bogies. Les dessins ont été remis aux ateliers de Bischheim qui ont approvisionné et réalisé toutes les pièces pour entamer la "noria" de remplacement des suspensions du parc TGV PSE : une étude et une réalisation à part entière à mettre au crédit de la SNCF.

Le dernier vendredi du mois d’octobre 1983, François Lacôte est venu faire une dernière revue de projet à ma planche : le lundi suivant, je changeais de Département pour aller aux "relations publiques – assistance technique" pour suivre trois mois de formation en vue du remplacement de Jacques Beffara, appelé à partir en retraite le 1er mars 1984. Une nouvelle vie professionnelle allait débuter dans un poste que j’avais lorgné depuis un certain temps déjà….
Toujours dans le bâtiment du 15 rue Traversière, bien évidemment je resterai en contact avec bon de mes anciens collègues, mais trop rapidement privé de mon « pote » Fabrice, emporté le temps d’un soupir par une saloperie de leucémie.



A+

UTKR
Undertaker
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Re: un métier: cheminot

Messagepar Undertaker
17 Juil 2014, 08:48

François D a écrit:Sacré boulot les écorchés.
Pour les couleurs, on dirait un mélange de Rotring/lavis à moins que ce soit des gouaches et du feutre ?

Salut François,

Le dessin original est dessiné au Rotring sur calque 180 gr/m². Puis, la mise en couleurs de la motrice TGV PSE est faite au feutre sur un tirage héliographique papier de 200 gr/m². Ceci a permis de reproduire le calque original depuis un format plus grand que le A0 jusqu'au A4, en passant par tous les formats intermédiaires. De plus, le tirage papier m'aurait bien aidé si je m'étais loupé lors de la mise en couleurs. Enfin, tous les formats ont été réalisés sur film polyester, tu ne peux pas imaginer le nombre de tirages qui en ont été faits partant tous azimuts.
Quant à la motrice TGV A, elle est à 85% de feutre et 15% de gouache environ. (L'image que j'ai postée est de moindre qualité, car il s'agit de la photo d'une publication). Plus tard, tous les dessins suivants étaient réalisés à la gouache, finalement mieux adaptée à la circonstance, d'autant que correctement diluée, elle s'accommode très bien du tire-lignes.

2B.

PS: désolé pour la BB 25187 ! Mais, je suis bien certain que tu sauras la mettre autrement en valeur.
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Re: un métier: cheminot

Messagepar 230-G-352
17 Juil 2014, 10:49

Bonjour Bernard,

Quelle passion et quel enthousiasme !Merci mille fois pour ton témoignage !

Tu parles avec passion d'un métier, cheminot, qui a été le tient pendant toute ta carrière.

A la lumière de tes récits, la majorité de nos cheminots actuels me donne plus l'impression d'être devenus des agents du chemin de fer que d'être des cheminots.

L'évolution de la SNCF a sans doute conduit à cette évolution que je regrette, la passion pour son métier semble être moins appréciée de nos jours et je ne suis pas sur que ce soit au profit de la SNCF.

Malheureusement (ou heureusement ?) cette évolution n'est pas spécifique à la SNCF, mais semble être une constante de notre monde industriel actuel... :(

Continue à nous enchanter avec tes anecdotes, je me régale à chaque lecture !
@+

Antoine

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Re: un métier: cheminot

Messagepar Aldayo
17 Juil 2014, 15:29

Pour retrouver la même motivation et passion, il faut maintenant se tourner du côté des start'up !!
Et c'est bien dommage !!
Qui croit savoir ne sait rien.
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Re: un métier: cheminot

Messagepar François D
17 Juil 2014, 22:06

Je reviens sur l'exposition de 1976 dans l'ancienne gare BASTILLE et cette impressionnante 141R.
img054.jpg


D'où pouvait sortir un engin pareil ?
2B parle d'une masse de 2 tonnes (tender compris je présume) . A l'échelle 1/5, elle était donc bien plus lourde que ses ainées !

Quelqu'un a-t-il des infos sur ce monstre ?
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Re: un métier: cheminot

Messagepar Bigoudi
17 Juil 2014, 23:45

Merci pour tout ce reportage 2B
une carrière de rêve pour un dessinateur projeteur féru de chemin de fer... :cool:
Modifié en dernier par Bigoudi le 18 Juil 2014, 20:10, modifié 1 fois.
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Re: un métier: cheminot

Messagepar Undertaker
18 Juil 2014, 06:26

François D a écrit:D'où pouvait sortir un engin pareil ?
2B parle d'une masse de 2 tonnes (tender compris je présume) . A l'échelle 1/5, elle était donc bien plus lourde que ses ainées !

Salut François,
Oui tender compris !
2 tonnes environ, c'est le chiffre qui m'avait été donné. Je me souviens du transport de la bête: la machine et son tender sont arrivés dans deux camionnettes Peugeot (des J7 je suppose). A cette époque, toute la gare était déferrée et, hors du bâtiment, il ne restait plus que de la "terre" sillonnée par les traces des roues des engins de chantier. Il devait forcément y avoir un accès routier. Je me souviens bien de la camionnette qui portait la machine, elle était "ventre à terre". Elle a été déchargée en la ripant sur des traverses. Je suppose que l'opération s'est faite avec une équipe de relevage.
J'ai entendu dire qu'elle appartenait à un toubib qui en avait fait la commande. Plus tard, il me semble avoir lu qu'elle avait été revendue. Mais je n'ai plus la mémoire de savoir où et quand j'ai lu ça.....

2B.

PS: aujourd'hui, c'est une trêve : je ne suis pas at home....
Undertaker
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Re: un métier: cheminot

Messagepar ligure
18 Juil 2014, 06:46

Si c'est bien celle que je pense, elle a été exposée aux portes ouvertes du dépôt de Longueau. D'après la personne qui été derrière ( propriétaire?) la machine a passé un long moment dans le fond d un garage avant de revoir le jour un peu par hasard.


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Re: un métier: cheminot

Messagepar Pierre bis
18 Juil 2014, 07:01

Intéressant l'histoire de la suspension. Je me souviens parfaitement de ces vibrations inconfortables à grande vitesse ... C'est à dire presque tout le temps sur la LGV. C'est vrai que ce n'était pas une bonne pub pour le TGV. Elles avaient disparu par la suite sans que je sache comment. Je me doutais bien qu'on avait travaillé dessus. Maintenant je sais qui et comment. Par contre de mémoire je ne me souviens plus quand les fameuses vibrations ont disparu.

Dans la série "On essuie les plâtres" je me souviens aussi des TGV A qui ne pouvaient fonctionner en UM au début. À Montparnasse deux trains partaient du même quai à 3mn d'intervalle. Problème informatique. Ça a dû durer 1 an. Peut être un prochain chapitre de cet intéressant fil
Modifié en dernier par Pierre bis le 18 Juil 2014, 12:24, modifié 1 fois.
Une brute qui tourne en rond ne va pas plus loin que deux intellectuels assis (Michel Audiard revisité)
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