Petite histoire de la DRG

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Re: Petite histoire de la DRG

Messagepar POMidi
25 Mai 2009, 23:23

:applause: :applause: :applause: Quel boulot :cool: :cool: :cool:

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Re: Petite histoire de la DRG

Messagepar Rockandrail
25 Mai 2009, 23:57

On peut dire ça, oui. :mdr: D'ailleurs les sujets s'espacent dans le temps. Je travaille actuellement aux G12. Un gros morceau qui annonce les locomotives unifiées. Il restera ensuite la fameuse K du Württemberg avant de passer aux séries unifiées. Un chapitre qui sera passionnant car il comprendra, notamment, l'histoire de la BR44 dont les versions "150X" ont été nombreuses à rouler en France.
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Re: Petite histoire de la DRG

Messagepar Le Basque
26 Mai 2009, 09:33

Rockandrail a écrit:L'histoire de la BR44 dont les versions "150X" ont été nombreuses à rouler en France.

Pour les Belges y en a plus ?...

:shock:
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Re: Petite histoire de la DRG

Messagepar Rockandrail
02 Juin 2009, 17:53

H116


3-1-7) La série 58

La série 58 comprend 3 modèles de locomotive au type 1’E

3-1-7-1) Les locomotives de série 58 d’origine prussienne

3-1-7-1-1) Série 580 - anciennement pr. G121

Avec la série 58, nous arrivons presque au terme de notre revue des locomotives à vapeur à tender séparé pour le trafic des marchandises provenant des anciens états allemands. Premières vraies machines lourdes, ces 150 intègrent également ce que l’on peut considérer comme la première locomotive unifiée : la fameuse G12. Avant d’arriver à sa version définitive, cette machine a connu un précurseur : c’est la G121.

Lorsque débute la première guerre mondiale, les KPEV disposent comme locomotive lourde pour le transport des marchandises de la G81 (machine Dh2) et de la G10 (machine Eh2) qui deviendront à la DRG les BR 5525-26 et 5710-35. Nous les avons passées en revue un peu plus haut.
En termes de puissance et de rendement, les deux machines étaient comparables. La G81 toutefois, du fait de sa charge par essieu plus élevée, n’était admise que sur les lignes principales.

Depuis la fin du 19ème siècle, les wagons aptes à transporter 20t de charge étaient de leur côté de plus en plus nombreux. Au cours des 15 premières années du 20ème siècle, aux KPEV, le nombre de wagons en service avait augmenté de 72,2% et la charge transportable par ceux-ci avait doublé. Pour les tracter, sur le plat et en rampe ne dépassant pas 1 :150, la G81 suffisait. Elle était dépassée par contre pour assurer le trafic de trains de 1200t, de plus en plus courants, ainsi que sur les rampes de 1 :100 présentes sur certaines lignes principales.

La hausse brutale des tonnages transportés causée par la guerre, associée à l’alourdissement constant des trains ainsi qu’aux distances à parcourir, exigeait donc la mise en développement d’une machine plus puissante et qui soit plus rapide.

Le projet de mise en service d’une locomotive pour marchandises de 85t avait été discuté dès 1913 par la Direction des Chemins de Fer de Breslau, sur l’insistance de Wagner. Il avait été prévu de faire précéder la mise en fabrication de série par plusieurs essais. Ce projet reçut l’approbation de l’ensemble des Directions. Obtenir davantage de puissance ne pouvait cependant se concevoir qu’avec une nouvelle chaudière, dont la taille exigerait un châssis à six essieux – en l’occurrence une machine de type 1’E.
Les premières locomotives pour marchandises de ce type ayant circulé en Europe étaient en service depuis 1904 sur le réseau d’Alsace-Lorraine. C’étaient des machines à quatre cylindres compound à entrainement De Glehn.

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C’est à l’entreprise Henschel et fils de Kassel qu’allait être confié le projet d’élaboration de la nouvelle machine 1’E. Le projet et sa mise en œuvre se voyaient cependant retardés par la guerre et ce n’est qu’en 1915 que la première locomotive sortait des ateliers.
Cette nouvelle locomotive, la G121, était la première locomotive prussienne pour marchandises qui fût motorisée en trois cylindres. On avait craint en effet que de trop hautes pressions s’appliquent aux conduites d’un moteur bicylindre et l’on avait opté pour la motorisation trois cylindres à simple expansion expérimentée sur la S102 (BR172). D’autres avantages allaient dans le sens d’une telle motorisation, comme une meilleure puissance au démarrage et un entrainement interne par vilebrequin comme sur les machines à quatre cylindres. Celui-ci entrainait le deuxième essieu accouplé, les deux cylindres externes agissant sur le troisième essieu.
Avec 5000 mm de distance entre parois, la chaudière de la G121 était non seulement la plus grande de toutes sur une machine pour marchandises des KPEV, mais elle dépassait même celle de la famille S10 de 100 mm. Elle ne serait dépassée plus tard que par la chaudière des P10 avec 5800 mm. La partie arrière de la chaudière était plus conforme à la tradition « Garbe » avec une boîte à feu étroite située entre les tôles du cadre. Le haut de la chaudière culminait à 2920 mm au dessus du rail. Cette hauteur aurait permis l’installation d’une chaudière arrière plus large, mais on préféra lui substituer une gigantesque surface de chauffe de 3220 mm x 1020 mm associée à la petite boîte à feu traditionnelle.
Suite à la pénurie de matières premières due à la guerre, la boîte à feu fut moulée en acier, de même que ses boulons de fixation.

Le cadre en tôles épaisses de 30 mm faisait encore appel à une vieille technologie prussienne, alors qu’en Allemagne du sud, depuis quelques années déjà, s’était imposée la conception tubulaire, qui avait même été partiellement adoptée par la Prusse pour la partie avant du châssis de la S101 (construction 1914).
La partie avant des tôles était découpée afin de permettre la rotation du bissel. Comme sur la G10, les roues motrices avaient un diamètre de 1400 mm. La locomotive était prévue pour une vitesse commerciale de 65 km/h, vitesse à laquelle 1330t devaient être tractées sur le plat. La machine tractait encore 1000t à 45 km/h en rampe de 5‰ et 1045t à 30 km/h en rampe de 10‰.

En raison de la guerre, les essais de traction eurent lieu au crochet de trains complets sur les lignes de Grunewald à Sangerhausen et de Cochem à Ehrang. 1400t furent également tractées en rampe de 10‰ sur une ligne sinueuse de Moselle. Aucune mesure de consommation en fonction de la charge ne fut réalisée. Malgré des pertes thermiques considérables, du surchauffeur aux cylindres, la consommation de charbon restait toutefois dans les normes. (1,9 kg par kW). A 15 kg/kWh par contre, la consommation d’eau était très élevée.

Avec une charge de 16,86t sur l’essieu médian et une charge maximale de 17,1t sur le deuxième essieu, la G121 était assez restreinte dans ses possibilités d’accès aux lignes, principales comme secondaires. L’alimentation du foyer pour alimenter l’énorme surface de chauffe d’origine exigeait de très gros efforts de la part du chauffeur et le cadre en tôle rendait particulièrement difficiles les visites d’entretien de l’entrainement interne.

+-+-+-+-+-+-+-+-+-+-+-+


Tout ce qui précède mena à plutôt considérer la G121 comme une machine expérimentale dont seuls 21 exemplaires seront finalement livrés à la Prusse par Henschel entre 1915 et 1917.
12 autres machines totalement semblables furent construites pour les chemins de fer du Reich en Alsace-Lorraine.
Les chemins de fer saxons, quant à eux, prirent possession de 20 machines très légèrement différentes qui formèrent la catégorie XIII H, future BR581 que nous verrons en détail un peu plus loin.

Les 21 machines prussiennes furent attribuées à trois Directions seulement : Erfurt, Kassel et Saarbrücken.

Le DRG intégra 15 machines sous les numéros 58 001 à 58 015 dont 8 de 1915, 6 de 1916 et une de 1917. Elles stationnèrent toutes au dépôt de Soest jusqu’à leur radiation en 1935.

Catégorie : 1’Eh3
Distribution : G56.17
Diamètre des roues motrices : 1400 mm
Vitesse maxi : 60 km/h
Fabricant : Henschel
Première mise en service : 1915
Tender : pr. 2’2’T21,5 avec 7t de charbon
Nombre total construit : 21
Nombre intégré à la DRG : 15
Numérotation : 58 001 à 015
Dates de dernière réforme : 1935

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Re: Petite histoire de la DRG

Messagepar Rockandrail
02 Juin 2009, 19:22

H117


3-1-7-2) Les locomotives de série 58 d’origine saxonne

3-1-7-2-1) Série 581 - anciennement sä. XIII H

Les locomotives de type E, de catégorie XI, commandées en 1905 par les chemins de fer saxons allaient suffire à la demande pendant une dizaine d’années. Comme partout en Allemagne, le déclenchement de la première guerre mondiale allait brutalement changer la donne. L’administration des chemins de fer saxons avait écouté d’une oreille attentive les discussions menées afin de tendre à l’uniformisation des machines. Elle n’allait pas seulement s’aligner à partir de 1919 sur les machines de type 1’Eh3 de la future catégorie G12, comme le feraient également le Bade et le Württemberg, mais elle allait bien avant cela déjà s’inspirer des plans réalisés pour la locomotive G121 construite par Henschel.

La motivation des chemins de fer saxons reste difficile à cerner à propos de ce choix qui consistait à remettre en construction une locomotive plutôt considérée comme ratée : s’agissait-il de leur part de s’associer à une réelle volonté d’uniformisation ou tout simplement de parer au plus vite, avec les moyens du bord, à un manque cruel de machines ? Toujours est-il que Hartmann allait livrer en 1917, sous les numéros de série 3946 à 3965, 20 locomotives 1’Eh3 calquées sur la prussienne G121, qui allaient être immatriculées par la Saxe 1165 à 1184 dans la catégorie XIII H.

Quelques légères modifications allaient différencier la machine saxonne de son modèle prussien : avec 210,51 m², la surface de chauffe de la XIII H dépassait de 15 m² celle de la G121. La surface du surchauffeur était également plus grande (81,26 m² contre 77,72 m²).
La XIII H ne possédait par contre pas de préchauffeur d’eau d’alimentation.
Des renforcements divers en avaient porté la masse totale à 101,1t, en faisant ainsi la première locomotive allemande pour trafic marchandises à dépasser 100t. Pour mémoire, la G121 ne pesait « que » 98,8t.

Après avoir fait construire ces 20 machines, les chemins de fer saxons se joindraient à leur tour en 1919 à la construction de la machine unifiée G12 qu’ils classeraient dans la même catégorie XIII H. On trouve occasionnellement dans la littérature ces locomotives faussement désignées comme sä. G12 (G12 saxonnes), mais la Saxe était alors la seule administration de chemins de fer allemande à ne pas utiliser la désignation prussienne pour les machines d’origine prussienne.

+-+-+-+-+-+-+-+-+-+-+


La DRG allait intégrer 14 des 20 locomotives construites sur le type de la G121 comme série 581, avec les numéros 58 101 à 58 114. Souffrant des mêmes défauts de conception que la version prussienne, à savoir un accès très difficile à l’entrainement interne et une boîte à feu trop petite, la première XIII H saxonne ne pouvait espérer rester davantage en service que son modèle.
Six de ces vingt locomotives XIII H de première génération (donc de type G121 et non pas futures G12) furent remises à la France en 1919 au titre des réparations. Elles y formèrent la série 150D 201 à 206. Trois de ces machines furent reprises par l’Allemagne en 1941 et groupées au dépôt de Zwickau (Saxe). Il s’agissait des machines 150D 201, 203 et 206, initialement 1165, 1170 et 1183 aux chemins de fer saxons.

Catégorie : 1’Eh3
Distribution : G56.17
Diamètre des roues motrices : 1400 mm
Vitesse maxi : 60 km/h
Fabricant : Hartmann
Première mise en service : 1917
Tender : sä. 2’2’T21 avec 7t de charbon
Nombre total construit : 20
Nombre intégré à la DRG : 14
Numérotation : 58 101 à 114
Dates de dernière réforme : 1935

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Re: Petite histoire de la DRG

Messagepar XTof_vl
06 Juin 2009, 10:29

:applause: :applause: :applause: :applause: :applause:


Christophe, qui prend le temps de lire.
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Re: Petite histoire de la DRG

Messagepar Rockandrail
07 Juin 2009, 21:42

H118


3-1-7-3) Les locomotives de série 58 unifiées

3-1-7-3-1) Série 582-3 - anciennement bad. G121-7 ; série 584 – anciennement sä. XIII H ; série 585 – anciennement wü. G12 et série 58 10-21 – anciennement pr. G12

Après la fondation de l’Empire Allemand en 1871, les Etats qui le constituaient avaient conservé une forte autonomie. Tout particulièrement, les spécificités ferroviaires de chacun n’avaient fait l’objet d’aucune centralisation. La construction des matériels – locomotives, wagons et infrastructures – était laissée à l’appréciation de chaque administration, en fonction des services attendus. Dans la mesure où aucun échange de matériel de traction n’existait entre les différentes compagnies, l’immense variété des constructions n’a pas été perçue comme un obstacle.
Il n’en allait pas de même des wagons de marchandises qui circulaient régulièrement d’une région à l’autre de l’Allemagne, si bien que le premier avril 1908 était fondée la Régie des Wagons de chemin de fer de l’Etat (DWV – Deutsche Staatsbahnwagenverband). A la suite de cette fondation, tous les wagons de marchandises répondraient à des normes de construction et de livraison unifiées.

L’absence de règles d’uniformisation équivalentes pour les locomotives se fit cruellement sentir au cours de la première guerre mondiale, lorsque toutes les administrations de chemins de fer allemandes se virent dans l’obligation de fournir du matériel aux autorités militaires.
Même si l’on avait bien tenté de regrouper les machines provenant d’une même compagnie, il devenait impossible de couvrir le besoin sans cesse croissant de pièces de rechange qu’engendraient les destructions de guerre. Il fallait tenir un inventaire pour chaque administration de chemins de fer et pour chaque série de machines. Les hangars de stock de pièces de rechanges de Varsovie et de Wilna ne pouvaient pas stocker en nombre suffisant un inventaire de pièces aussi disparate, notamment pour les plus imposantes d’entre elles (chaudières et essieux). Plusieurs mois pouvaient ainsi se passer avant qu’une demande faite à l’arrière ne se traduise par une livraison au front. Il n’y avait même dans certains cas pas de désignation uniforme pour le même type de pièces suivant la compagnie à laquelle elles s’adressaient. Aucune règle de normalisation ni d’échange ne pouvait être mise en place.
Enfin, les personnels de conduite rencontraient des difficultés, surtout la nuit, en raison des différences existant entre les divers systèmes de commande des machines.

Au vu de cette situation, il est compréhensible qu’en 1916, à l’incitation du ministère des travaux publics, l’ensemble des administrations de chemins de fer allemandes se soient entendues pour la mise en construction commune d’une locomotive unifiée pour le transport des marchandises.

Derrière cette « incitation » se trouvait bien évidemment le commandement militaire qui avait un besoin pressant, non seulement de machines en plus grand nombre, mais aussi de machines beaucoup plus puissantes.
Faute d’un projet approprié, on se contentait d’abord de remettre en construction les locomotives à vapeur humide de catégorie G71 (Dn2 – voir H95) et G73 (1’Dn2v). Mais très vite, le commandement militaire mettait en exergue les insuffisances que présenteraient ces machines de conception ancienne et exigeait une machine moderne dotée de la surchauffe et du préchauffage de l’eau qui fût capable de tracter 700 à 750t à 20 km/h en rampe de 10‰ et de rouler sans accrocs, en pleine charge, à 60 km/h sur le plat.

Dans les grandes lignes, la G10 déjà existante (future BR 5710-35) aurait pu répondre à ce cahier des charges. Mais ses qualités de fonctionnement étaient limitées à vitesse élevée et sa chaudière n’aurait sans doute pas résisté à la mise en charge continuelle que l’on attendait de la nouvelle machine.

Pour la nouvelle locomotive, la masse d’adhérence minimale de 70t pour une charge par essieu de 16t seulement, l’installation d’une chaudière de grande dimension exigeaient qu’il y eût cinq essieux accouplés. Le comité des locomotives allait présenter deux options dans ce sens :

- une machine Eh2 de 77,5t
- une machine 1’Eh3 de 90t

En faveur de la machine E, il y avait la simplicité. Contre elle, les contraintes de pression que subirait la motorisation bicylindre et l’usure du premier essieu accouplé jouant le rôle d’essieu directeur. L’ingénieur Fuchs avait, pour le compte des chemins de fer du Reich, effectué des comparaisons d’usure des boudins de roues en absence et en présence d’un essieu directeur indépendant, sur des machines E et 1’E et avait constaté une usure deux fois plus rapide de ceux-ci sur les machines E. L’essieu directeur permettait également un meilleur comportement de roulement sur les voies de mauvaise qualité.

Bien que le coût en fût plus élevé, l’on opta donc pour une machine de type 1’E à motorisation trois cylindre, plus souple au démarrage et moins contraignante en pression pour les conduites et vannes. Compte tenu des insuffisances que nous avons évoquées à son propos, une remise en en construction de la G121 fut immédiatement écartée au profit d’une machine entièrement nouvelle.

+-+-+-+-+-+-+-+-+-+-+-+


C’est la firme Henschel et Fils qui reçut la commande lui demandant de monter le projet et de se charger de la mise en construction de la nouvelle locomotive 1’Eh3 pour le service des marchandises. A ce moment précis, Henschel était en train de construire pour le compte de l’administration militaire ottomane une locomotive 1’E pour marchandises dotée de roues accouplées de 1250 mm de diamètre, d’une surface de foyer de 4,5 m² et d’une motorisation à trois cylindres avec entrainement sur un seul essieu. La nouvelle locomotive, qui recevrait la désignation « G12 », s’inspirerait de l’expérience acquise par la construction de la machine ottomane et de celle de la G121.
Les premières unités furent livrées en 1917 et immédiatement mises en service par les chemins de fer prussiens et impériaux. Des machines de construction identique allaient rejoindre les années suivantes les chemins de fer de Saxe (comme catégorie XIII H nouvelle), les chemins de fer du Bade (comme catégorie G121-7) et ceux du Württemberg (comme catégorie G12). Environ 1500 locomotives de catégorie G12 seront ainsi construites jusqu’en 1924.

Si les machines ne constituaient pas encore une série unifiée au sens où le définirait la DRG en 1920, c’était tout de même une étape clef dans cette direction.

+-+-+-+-+-+-+-+-+-+-+-+


La locomotive rompait avec presque toutes les traditions de construction prussiennes et se différenciait considérablement de la G121.
Le cadre d’un seul tenant était de type tubulaire. Au lieu de la petite boîte à feu de conception Garbe, la machine disposait d’une large chaudière arrière de conception Belpaire. Le centre de la chaudière culminait à 3000 mm au dessus du rail. Du jamais vu pour une machine prussienne. Les trois cylindres entraînaient l’essieu moteur médian qui portait un vilebrequin.
La suspension était également nouvelle et remarquable. Les ressorts des trois premiers essieux accouplés se situaient au dessus du niveau de l’essieu et étaient reliés par de très longues vis de serrage aux leviers de compensation. Une telle disposition n’était pas possible pour les deux essieux arrière, à cause du foyer et des boîtes d’essieux. De ce fait, les quatrième et cinquième essieux accouplés se rattachaient à un ressort commun disposé entre eux deux.

Les ressorts de suspension du bissel étaient reliés à ceux des essieux accouplés par un levier de compensation rallongé qui transférait les contraintes sur un pendule relié lui-même au cadre principal par un berceau, lui-même relié au cadre du bissel par quatre autres pendules.
De cette manière, la locomotive se trouvait dotée d’une suspension à trois points.

+-+-+-+-+-+-+-+-+-+-+-+


La G12 allait subir quelques modifications au cours de sa construction car certains groupes de construction avaient fait des choix techniques discutables. Le diamètre initial de la cheminée était trop petit. Il allait être modifié. Du fait de la guerre, au lieu d’être en laiton rouge, les robinets et les vannes étaient construits en fer et fuyaient. Ils seraient remplacés après la guerre. Les retours du réchauffeur étaient trop près de la paroi arrière et seraient avancés de 300 mm. L’usure rapide des boîtes de l’essieu moteur due à la charge trop élevée amenait à les remplacer en 1925 par des boîtes de conception Obergethmann.
Au début, les deux sablières étaient installées près du dôme de vapeur sous une carrosserie commune. Le sable ainsi stocké ne restait pas sec et ne remplissait pas son rôle d’anti-patinage. On aménagea donc deux sablières séparées dotées chacune de leurs tuyaux de descente.

+-+-+-+-+-+-+-+-+-+-+-+


Les performances de la machine, mesurées en 1924 s’établissaient comme suit :

- 1330t à 65 km/h sur le plat :
- 1150t à 40 km/h en rampe de 5‰ ;
- 1000t à 25 km/h en rampe de 10‰.

Le détail des commandes s’établit comme suit :

- 1168 machines livrées par Henschel, Linke-Hofmann, Borsig, Hanomag, Schichau, Krupp, Rheinmetall et AEG aux chemins de fer prussiens.
- 118 machines livrées par Henschel et Grafenstaden aux chemins de fer impériaux.
- 88 machines livrées par MBG Karlsruhe et BBC Mannheim aux chemins de fer du Bade.
- 62 machines livrées par Hartmann aux chemins de fer de Saxe.
- 63 machines livrées par Esslingen aux chemins de fer du Württemberg.

La DRG intégra les machines suivantes :

- Des chemins de fer du Bade, de l’ex série G121-7 sous les numéros 58 201 à 225, 58 231 à 272, 58 281 à 303 et 58 311 à 318.
- Des chemins de fer de Saxe, de l’ex série XIII H et nouvelles constructions de 1924, sous les numéros 58 401 à 462.
- Des chemins de fer du Württemberg, de l’ex série G12, sous les numéros 58 501 à 543.
- Des chemins de fer de Prusse, sous le numéro 58 1001, une locomotive initialement destinée à la Turquie, et sous les numéros 58 1002 à 58 2143, les locomotives ex KPEV.

Le domaine d’exploitation des G12 couvrait pratiquement toutes les Directions Régionales d’Allemagne comportant des lignes pentues, de Saarbrücken et Trèves à la Bavière et Breslau, à l’exception de l’Allemagne du Nord. La plus au Nord des Directions exploitant des G12 était celle de Hanovre.

+-+-+-+-+-+-+-+-+-+-+-+


Quelques machines furent utilisées par la DRG pour ses recherches sur la chauffe à la poussière de charbon : la BR 58 1416 et la BR 58 1894 furent équipées en 1930 du système de chauffe de conception AEG et les BR 58 1353, 58 1677, 58 1722 et 58 1794 furent elles équipées entre 1928 et 1930 du système de chauffe STUG. Les deux système utilisaient de la poussière de lignite sèche à grain fin et se différenciaient principalement par la nature et la disposition des brûleurs.
Après la deuxième guerre mondiale, la DR est-allemande allait remettre en service ce type d’alimentation, forcée qu’elle y était par le manque de charbon pour ses locomotives.
L’ingénieur Hans Wendler en simplifia la mise en œuvre en remplaçant tous les éléments mécaniques liés au transfert de la poussière depuis le tender vers les brûleurs par un système d’acheminement pneumatique. Son système permettait l’utilisation de poussières de charbon de moins bonne qualité grâce à quoi ses locomotives étaient pleinement fonctionnelles en service régulier.

La DR transformera les machines suivantes en système Wendler :

- une G12 badoise
- dix XIII H saxonnes
- une G12 Wurtembergeoise
- quarante-trois G12 prussiennes (dont la BR 58 1353 précédemment équipée du système STUG).

Aucune information fiable n’existe quant au nombre exact de locomotives G12 ayant été récupérées par les deux administrations allemandes d’après la deuxième guerre mondiale (DB et DR).
Ce qui est sûr, c’est que la DB a très vite pu renoncer à les utiliser alors qu’on en trouve encore en service à la DR en 1976. (Laquelle DR avait en plus récupéré en 1956 13 machines G12 polonaises - ex Ty 1 aux PKP – dont les anciens numéros DRG ne sont pas identifiables pour trois d’entre elles. Ces machines furent ré-immatriculées 58 2144, 58 2145 et 58 2146).

Les G12 de la DR furent en service en Thuringe et sur les lignes pentues de Saxe. A la fin des années 60, seules les machines à combustion classiques étaient encore en service. Les locomotives Wendler avaient été radiées depuis longtemps.
Le dernier dépôt à abriter des G12 fut le dépôt de Aue, en Saxe, qui comptait encore cinq machines en service à l’horaire d’été 1976. Les derniers trains réguliers tractés l’étaient sur la ligne joignant Zwickau à Schwarzenberg. La survivance des G12 dans les monts Métalliques a tenu en grande partie à sa compatibilité avec les petites plaques tournantes du dépôt de Aue sur lesquelles aucune autre machine de cette puissance (telles les machines reconstruites BR5830) ne pouvait prendre place.

Avec le changement d’horaire de l’hiver 1976/1977, les G12 cédèrent définitivement la place aux machines diesel 1182-4.


582-3

Catégorie : 1’Eh3
Distribution : G56.16
Diamètre des roues motrices : 1400 mm
Vitesse maxi : 65 km/h
Fabricant : Karlsruhe (maître d’oeuvre)
Première mise en service : 1918
Tender : pr. 3T20 avec 6t de charbon
Nombre total construit : 88
Nombre intégré à la DRG : 88
Numérotation : 58 201 à 58 318 (numérotation non continue)
Dates de dernière réforme : 1976

584

Catégorie : 1’Eh3
Distribution : G56.16
Diamètre des roues motrices : 1400 mm
Vitesse maxi : 65 km/h
Fabricant : Hartmann
Première mise en service : 1919
Tender : sä. 3T21 avec 6t de charbon
Nombre total construit : 62
Nombre intégré à la DRG : 62
Numérotation : 58 401 à 462
Dates de dernière réforme : 1976

585

Catégorie : 1’Eh3
Distribution : G56.16
Diamètre des roues motrices : 1400 mm
Vitesse maxi : 65 km/h
Fabricant : MF Esslingen
Première mise en service : 1919
Tender : pr. 3T20 avec 6t de charbon
Nombre total construit : 63
Nombre intégré à la DRG : 43
Numérotation : 58 501 à 543
Dates de dernière réforme : 1976

5810-21

Catégorie : 1’Eh3
Distribution : G56.16
Diamètre des roues motrices : 1400 mm
Vitesse maxi : 65 km/h
Fabricant : Henschel (maître d’oeuvre)
Première mise en service : 1917
Tender : pr. 3T20 avec 6t de charbon
Nombre total construit : 1286
Nombre intégré à la DRG : 1143
Numérotation : 58 1002 à 58 2143
Dates de dernière réforme : 1976


BR58-10-23 (G12).jpg
BR 58 281 (ex bad. G12-5 n° 1047)(Brown 5001/1921)


BR58-10-23 (G12) STUG.jpg
BR 58 1353 (ex pr. G12 5586 Münster)(Borsig 10618/1920) équipée du système de chauffe à poussière de charbon STUG


BR58-10-23 (G12) Wendler.jpg
BR 58 1353 (ex pr. G12 5586 Münster)(Borsig 10618/1920) transformée par la DR et équipée du système Wendler


La G12 en modèle :

A l’échelle HO, je ne connais que le modèle ROCO 43203 :



A l’échelle N, le modèle minitrix décliné en livrées diverses, dont la livrée DRG, dotée d’un moteur à rotor sans fer, est une des plus belles machines vapeur disponible à cette échelle.
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Re: Petite histoire de la DRG

Messagepar POMidi
07 Juin 2009, 22:19

:applause: :applause: :applause:
Kolosal étude. :D Quel boulot. :cool:

Certes, les G12 le méritent bien.

Bravo et merci à Pierre de nous faire partager ses connaissances encyclopédiques.

Amicalement.

Pierre
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Re: Petite histoire de la DRG

Messagepar Rockandrail
07 Juin 2009, 23:10

:yin Merci Pierre. Prochaine livraison: la K du Württemberg.
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Re: Petite histoire de la DRG

Messagepar POMidi
07 Juin 2009, 23:19

Très sincèrement cela le mérite. :cool:

Petite remarque sur les unités équipées pour l'utilisation de la poussière de charbon: cela fait une impressionnante rehausse sur le tender. Très visiblement cela ne passerait pas dans le gabarit international: cette solution n'était donc à priori praticable que grâce au généreux gabarit Germanique.

Bonne :dodo:

Pierre (celui d'en bas) :D
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