Bonjour à tous,
Un autre exemple d'atelier privé avec la Compagnie Française des Établissements Gaillard. L’atelier d’Angoulins (17) est l’un des nombreux que possède sur la France cette compagnie créée en 1909 à Béziers (34) par l’industriel Achille Gaillard (1859-1935). Une "publicité" des années 1920 :
Le 15 novembre 1929, sous couvert du grand patron Achille Gaillard, Marcel Poupon (1893-1976), originaire des Deux-Sèvres, ingénieur et directeur des ateliers de Saint-Florentin dans l’Yonne, sollicite de la Préfecture de La Rochelle une autorisation d’installer et d’exploiter un atelier de créosotage "en notre chantier d’Angoulins-sur-Mer". Le Conseil d’Hygiène de la Charente-Inférieure ayant émis un avis favorable, le préfet André Bouffard signe l’arrêté d’exploitation le 18 mars 1930.
L'atelier va s'installer au nord de la gare d'Angoulins et développer son activité jusqu'à la seconde guerre mondiale. Par deux décisions du ministre Edouard Daladier en mai et août 1939, l’atelier devient la propriété du ministère de la Défense Nationale et de la Guerre le 10 mai 1940. Devant le préfet de La Charente-Inférieure, François Pierre-Alype, un acte de vente est signé entre le Lieutenant-Colonel Froissart, chef militaire du génie de Bordeaux et Etienne Chichet, fondé de pouvoirs d’Achille Gaillard. L’atelier devient un centre de stockage de l’armée. Après guerre, et par décret du 19 juillet 1948, le centre de stockage devient un camp militaire du génie.
Cette très grande entreprise a donc traversé le vingtième siècle. Son champ d’action est vaste et couvre l'achat et exploitation de forêts, la transformation des arbres en grumes, pieux, sciages, poteaux télégraphiques et électriques, traverses de chemin de fer, étais de mines, bois de pâte, piquets, bois de chauffage, treillage en bois, grillages, grilles et portails en métal. En 2006, la société est acquise par la Foncière Saint-Honoré, les deux fusionnent en 2007 et l’ensemble prend le nom de Bleeker (Source : Jean-François Charpentier : raconte-moi Angoulins).
Quelques autres informations, glanées au hasard de mes recherches, sur les évolutions diverses et variées de certains ateliers privés :
- Atelier Marthon (16) MT : ouvert 1935 – arrêt activités 1983 – dernier propriétaire René Mondiet – 53 employés 1970 – 18000 traverses/an,
- Atelier Bois Imprégnés (40) BI : ouvert 1919,
- Atelier Rollin Dupré (71) PM : ICPF (Industrie et Commerce des Produits de la Forêt) ouvert 1935 – rachat en 1987 par société Larochette – France Bois Imprégnés reprend l'entreprise en 1995 et supprime la raison sociale ICPF – filiale du groupe Baret depuis 1997,
- Ste I.R.C.B : Société d'Injection Rapide et de Conservation des Bois. Arc les Gray (70) : Par arrêté préfectoral du 18 septembre 1934, la société d'Injection Rapide et de Conservation des Bois (IRCB) , fondée en 1919, est autorisée à exploiter une usine d'imprégnation en bord de Saône. Pierre Schelameur est à l’origine de cette création, et il semble que l’établissement soit ouvert dès 1924. L'injection consiste en l'imprégnation profonde du bois, sous vide, puis sous pression (dérivé du procédé Rüping) , de produits fongicides et insecticides, afin de traiter les poteaux, mâts, traverses de chemins de fer et étais. La société forestière anonyme IRCB, fournisseur des administrations de l'Etat et des compagnies de chemin de fer, exploite des usines à Saint-Vit (25) et à Saint-Claude (39). Entre 1958 et 1966, 1200 m² de bâtiments sont construits. En 1967, son siège social est à Saint-Vit, et elle possède une usine à Valmy (Algérie) et une autre à Saint-Michel-sur-Meurthe (88). A cette époque, l'usine d'Arc-lès-Gray traite annuellement 5000 m3 de bois. Le chantier couvre 5 hectares, dont 3500 m² couverts. La société IRCB est reprise en 1971 par le groupe Rollin et Dupret, implanté dans la Loire, puis est intégrée en 1992 à la holding Rochette Bois Industrie, connue sous l'appellation France Bois Imprégnés. Cet établissement poursuit aujourd'hui la même activité. Il traite annuellement 4000 m3 de bois résineux, soit 25 000 poteaux, pour EDF, France Télécom, ainsi que des rondins pour portiques, piquets pour magasins de bricolage, etc.
Pour revenir au clou repère, celui d'écartement possède une tête de forme ronde portant l'inscription des deux derniers chiffres de l'écartement réel pour lequel la traverse est entaillée. Cependant, il existe quelques clous, plus rares, affichant l'inscription complète à quatre chiffres de l'écartement. A la place de clous traditionnels, des coupelles embouties à crampons d'ancrage installées sur les traverses remplissent le même office. Les écartements pour les traverses bois sont de 1437 mm, 1440 mm, 1445 mm, 1450 m, 1455 mm, 1460 mm et 1465 mm en fonction du rayon de la courbe. Ainsi par exemple, dans les courbes de 300m de rayon, les rails sont posés avec un écartement de 1450 mm. Ci-dessous, un assortiment de clous repères d'écartement :
et des modèles de coupelles embouties à crampons d'ancrage dans la traverse. Avec de gauche à droite, pour un écartement de 1437 mm, 1440 mm, 1445 mm et 1455 mm pour tire fond à Filet Variable (FV) :
Diverses informations techniques et spécifiques du bois sont reportées sur les traverses. Les essences de bois exotiques fournies par le Consortium Forestier et Maritime des Grands Réseaux entre 1921 et 1972 sont ainsi précisées par un clou à tête de forme carrée comportant un numéro de référence de l'essence. Toutes ces essences sont donc inventoriées par un numéro repère :
1 Ozouga, 2 Alep, 4 Eveuss, 5 Tali, 6 Bilinga, 7 Kévazingo, 9 Azobé, 15 Dina, 18 lroko, 22 Douka, 23 Movingui, 24 Miama, 25 Coula, 26 Padouk, 28 Oboto, 29 Ebontzock et 30 Palétuvier.
Suite aux différents tests de l'époque ou la rareté de l'espèce sur les sites forestiers, certaines essences sont éliminées de l'exploitation. Le code de référence pour désigner l'essence du bois exotique se limite alors à un seul chiffre de 1 à 9 (donc pas de confusion possible avec le clou de millésime, de tête de forme identique). Cette indication est utilisée jusque dans les années 1960, puis l'emploi de bois exotiques se réduisant, et ceux-ci présentant des structures significatives, le besoin de clou repère pour les reconnaître n'est plus nécessaire. Photos suivantes clous 1 Ozouga et 9 Azobé :
Concernant les essences de bois indigènes (europe), ce sont des coupelles embouties à crampons d'ancrage qui indiquent (avec des lettres) les principales caractéristiques ou particularités des traverses :
- N : traverse en chêne du Nord,
- AN : traverses en hêtre d'altitude abattu normalement (en période hors sève du 15/10 au 31/03),
- AS : traverse en hêtre d'altitude abattu en sève (du 01/04 au 14/10),
- F : traverse fluorée,
- SC : traverse en pin imprégnée au sulfate de cuivre, puis trempées dans la créosote,
- COB : traverse imprégnée aux sels Cobra.
Ci-dessous, les coupelles embouties pour une traverse en hêtre d'altitude abattu normalement (AN) et une traverse en hêtre d'altitude abattu en sève (AS) :
A suivre....
Cordialement,