Aaaall abooooard !!!

[joseph]

Sur l'aspect des sciences, j'ai très peu de connaissance sur l'histoire des peuples, mais le peu que j'ai vu c'est que beaucoup ont eu leur heure de gloire à une certaine époque. Aujourd'hui, on distingue bien ce qu'on fait les "blancs" puisque c'est proche de nous.
Mais les égyptiens par exemple, connaissaient déjà pas mal les mécanismes célestes et maitrisaient pas mal de choses en géométrie, et dans d'autres domaines.

[Rapide 424]

Sympa, le marche hippie (enfin ...) d'Anjuna. Il y en a quand-meme plein qui sont arrives a l'epoque benie et qui y sont encore, ... avec quelques rides ... et la peau qui tient moins bien sous les mini-jupes en peau. Mais je me moque amerement ... Il s'est passe a l'epoque quelque chose dans le mental humain qui n'est sans doute pas pres de se reproduire. Plein de francais d'ailleurs !

Nous vivons, nous, occidentaux et assimiles la periode la plus faste de la civilisation humaine au niveau de la dolce vita, de la securite, de la liberte de circuler et de la comprehension de la nature... et cette periode finira bientot. J'ai essaye de l'apprecier pleinement ce soir, avec un verre de porto (ou deux) a regarder le soleil se coucher tout rouge sur la mer d'Arabie, en ecoutant du Bob Marley (Eh oui, c'est pas tres indien, ca, mais ici, il faut plaire aux touristes ! Mais ca fait rien, autant je vomis le rap, j'aime bien le Reggae...) surtout apres que la petite jeune fille qui tient cette echoppe internet/agence de voyage/ ou nous avons reserve nos billets de trains pour Calicut, Kerala, nous a dit qu'elle gagnait 5000 roupies par mois. 5000 roupies, cela fait 100 dollars, ou 70 euros.. (Bon, en France, elle aurait au moins le smic, soit 12 ou 1300 euros ...) quand nous avons sorti les billets pour payer les 2500 roupies (40 euros) pour les deux billets de train en classe "Sleeper A1", j'ai eu comme un peu honte. Reiko lui a demande si elle avait jamais voyage. Non, bien sur... sauf aller a Margao, la grosse ville du coin, de temps en temps, et encore avec un oncle qui a une voiture et qui fait taxi ... Et qu'est-ce que ca lui fait de voir tant de touristes depenser tant comparativement a ce qu'elle gagne ? Aucune colere, aucune rancoeur apparente ... c'est la vie, c'est comme ca, peut-etre un jour elle fera un beau mariage et son mari pourra lui payer des voyages ... A chaque fois qu'on va Reiko et moi au DAB pour retirer 10000 roupies, et ceci pour tenir deux ou trois jours au prix indiens, on retire deux fois son salaire ... Et encore, elle a un bon job dans un coin touristique parce qu'elle parle deux ou trois langues !

Les voyages pas chers et libres, ce sera bientot termine. Je suis persuade que c'est une "fenetre d'apportunite" qui s'est ouverte dans la deuxieme partie du 20eme siecle et qui va se refermer avant la moitie de celui-ci. Ceci pour de multiples raisons : politiques, economiques bien sur, mais surtout par saturation de l'espace vital et l'impossibilite de trimballer des centaines de millions d'indiens ou d'africains comme on traimballe a present quelques dixaines de millions de privilegies occidentaux et assimiles .... D'abord, il n'y aura jamais assez de ressources naturelles disponibles pour cela.

Donc, profitons en, ceux que, comme moi, cela passionne ! Et perso j'en aurais profite ...

[Pierre bis]

Assez d’accord avec Rapide à propos des sciences, avec quelques bémols que je lui ai exprimés par ailleurs :

- La science des 16e à 20e siècle a été effectivement massivement européenne, l’Amérique du 20e siècle restant européenne dans ce domaine, la plupart de ses scientifiques, d’Einstein à Von Braun, étant alors d’origine européenne. Moins d’accord pour la dominante germano-anglo-saxonne, qui oublie l’Italie, de Leonardo à Fermi et surtout la France, avec au hasard Pascal, Lavoisier, Fermat, Pasteur, Curie

- Ce constat n’est pas raciste à la base, sauf si on en conclut sans preuve étayée qu’il serait lié à une supériorité génétique. Pour développer une recherche il faut sans doute deux choses :

o Des moyens donnés aux chercheurs pour assurer leur vie matérielle (ils mangent comme tout le monde, même s’ils sont souvent moins exigeants qu’un footballeur côté luxe) et pour assurer leur recherches (là c’est tout de suite très cher)
o Une volonté politique de les laisser chercher.


La volonté politique est très importante. J’ai lu quelque part (la revu « l’Histoire » je crois) que bien avant les explorateurs européens du 17e siècle, les chinois avaient armé une puissante flotte de Jonques (certains faisaient plus de 50m) qui étaient allées jusqu’à l’est africain. Mais quand l’amiral (un eunuque mongol si mes souvenirs sont bons) est revenu en décrivant ce qu’il avait vu et même en rapportant quelques trophées (genre girafes ou bijoux), les conditions politiques avaient changé en Chine et le nouvel empereur voulait refermer le pays. Le malheureux explorateur fut traîté de menteur et exécuté.

Au bout du compte ce sont sans doute ces conditions politico-philosophiques qui expliquent l’essor de la science européenne. Si on se souvient de Galilée ou de Darwin, cela ne s’est souvent pas fait tout seul.

Aujourd’hui, comme le remarque Rapide, il y a des chercheurs de toutes les ethnies mais, il y a toujours un mais : ils sont, quelque soit leur origine, majoritairement installés aux Etats-Unis, sans doute moins par amour de l’American Way of Life que parce que ce pays leur donne tous les jouets dont ils ont besoin pour leurs expérience. Car les chercheurs ont souvent un point commun : ils s’intéressent souvent peu à la politique et même souvent à la vie en général mais ne supportent pas de ne pas avoir tous les moyens pour mener leurs recherches. Einstein, très engagé politiquement et, dirait-on aujourd’hui, médiatiquement, était une exception.

[Pierre bis]

Michel a sans doute raison pour les voyages, même si dès le moyen-âge, (et avant?) il existait des voyageurs, sous la forme par exemple des pélerins de Compostelle. Certes c'était bien plus long et certainement moins confortable.

Ce qui me parait assez nouveau et lié effectivement à la facilité de transport et plus encore de télécommunications, c'est la possibilité d'émigrer tout en gardant un lien avec son pays d'origine. Je pense à ma femme russe qui va une fois par an en Russie et surtout peut appeler quand elle veut et aussi longtemps qu'elle veut sa soeur pour une somme modique (le voyage, lui, reste encore un luxe). Et, si j'en juge par les magasin de télécom de mon quartier, il existe une multitude d'offres permettant aux immigés africains ou indiens de rester en contact avec "le pays". Cet aspect là sera-t-il lui aussi remis en cause par l'épuisement des ressources lié à la surpopulation? Je n'en sais rien.

Quant aux voyages physiques, il sont l'appanage des classes moyennes des pays riches qui sont effectivement menacées par la généralisation du modèle du tiers-monde: une minorité de très riches et une écrasante majorité d'opprimés. Il restera globalement autant de gens assez riches (et oisifs) pour les voyages d'agrément mais il seront répartis différemment.

Mais il y aura aussi sans doute toujours des Michel prêts à sacrifier beaucoup de choses pour continuer à voyager, fut-ce en dirigeable ou à dos de Chameau à la place de l'avion.

[Rapide 424]

A propos du futur des voyages, voici un avis professionel de "Domi", connu sur ce forum (J'espere qu'il ne m'en voudra pas de copier/coller sa lettre perso.):


Michel, concernant la future raréfaction des voyages, il y a un point que tu n'évoques pas, ou du moins que j'ai loupé dans ta démonstration (qui me semble malheureusement empreinte d'un terrible bon sens - qu'est ce que j'aimerais que tu te trompes mais je pense que tu as malheureusement totalement raison): l'augmentation du coût de l'énergie, qui va faire suivre aux moyens de transport une accessibilité inverse de celle qui a prévalu, disons jusqu'aux années 80.

Quand on considère par exemple que la boîte qui m'emploie diminue en en capacité de chiffre d'affaire (échangeant des zingos de 580 sièges contre de nouveaux modèles de capacité 1 fois et demi moindre), je vois ça comme un apperçu de ce qui nous attend.

Dans 20 ou 30 ans, il est possible que le transport aérien devienne la portion congrue. Puis que ceux qui vondront voyager en soient réduits à booker des cabines sur des cargos mixtes, ou sur des paquebots qui auront été remis en service pour la circonstance. A la sauce "low cost"/ bétaillière.... Etc, etc...

Donc tu as raison, profitons-en tant qu'on peut. Après, il sera trop tard. Le village de l'autre côté de la vallée sera celui des envahisseurs, ou des envahis, au choix, si on sera capable de franchir le col sans se faire boulotter par les loups ni se faire détrousser par des bandits de grand chemin (à Marseille, il semble que ce soit déjà le cas, au moins pour les clients du TGV).

Et dernier point, je partage totalement ton point de vue pour le rejet sans appel du rap, cette sous-culture, sous-musique et sur-merde.

N'joy votre séjour, Reiko et toi. Vous avez bien raison d'en profiter, l'Inde est un pays qui nous fascine Carolin et moi et que nous avons bien l'intention de visiter avant que les voyages deviennent impossibles.

Domi

[Pierre bis]

Une question que je me pose: pourquoi le monde du petit train attire-t-il autant de pessimistes souvent à la limite de l'aigreur? J'ai toujours pensé être moi-même pessimiste et ai le plus souvent été perçu comme tel, du moins dans le monde "normal", mais ici mon esprit de contradiction fait que je me surprend sà défendre systématiquement une vision optimiste des choses

Tout n'est pas faux dans ce que tu dis Michel mais de là à voir l'avenir systématiquement aux couleurs les plus sombres! Et visiblement tu n'es pas seul. Un ilôt peuplé de réalistes dans un océan d'aveuglement? Posture facile!

[Rockandrail]

Le modélisme n'y est pour rien sauf que, technique, le loisir rassemble un type d'hommes un peu particulier:

Car ce pessimisme est l'objet d'hommes mûrs, plutôt instruits et cultivés, qui observent avec colère ou dépit (un mélange des deux en fait) le délitement continu et accéléré des structures de la société "moderne". Délitement entrepris par ses élites mêmes! Une société qui, depuis la Renaissance, malgré ses tourments, ses errements, ses horreurs que le 20ème siècle a porté au paroxysme, a toujours été de l'avant dans le développement de la pensée, des arts et des techniques et qui semble aujourd'hui, à ces hommes que Jules Romains qualifiait "de bonne volonté", auxquels je me joins humblement, se précipiter vers sa fin. Et, lucides, ils enragent de ne rien pouvoir faire pour inverser la tendance.

Lire, relire et lire encore "Le Paradoxe de Fermi". Son auteur, Jean-Pierre Boudine, n'est pas un vieux modéliste grincheux. C'est un mathématicien du CNRS.

[Pierre bis]

...le délitement continu et accéléré des structures de la société "moderne". Délitement entrepris par ses élites mêmes! ...

Je comprends ton état d'esprit et peux en partie le partager, mais en partie seulement. Il faut faire attention à deux travers: le rejet et la peur d'évolutions que l'on ne comprend pas et l'idéalisation du passé.

Tout n'est pas bon, loin de là dans les évolutions de la société, mais les sociétés ont toujours évolué en zigzag, avec de nombreuses fausses routes, corrections et parfois retours en arrières partiels mais jamais totaux.

Quant au discours de la décadence, attention là aussi. Cela fait au moins deux cent ans qu'il est tenu en France et en Europe par les tenants des différents anciens régimes, et la société est toujours debout.

Je suis moi aussi effrayé par certaine choses, et avant tout par une surpopulation terrestre incompatible aujourd'hui avec l'accès pour tous à un certain confort que je ne veux pour rien abandonner. Pour autant l'avenir peut toujours prendre plusieurs visages et il nous appartient aussi, dans la mesure de nos faibles moyens individuels, de choisir le moins grimaçant. Ce qui me déplaît dans les discours apocalyptiques, c'est le sentiment qu'à force de tenir ces discours, les prédicateurs finissent par ne plus redouter l'apocalyse mais par la souhaiter.

Bon, nous dérivons. Laissons plutôt Michel nous raconter comment la plage indienne lui permet d'oublier un temps le 18e arrondissement.

[Rapide 424]

Eh bien, nous revoici dans l'Inde profonde, a Kozhikonde, (Calicut -- a ne pas confondre avec Kolkotta/Calcutta.) C'est toujours sur la cote, mais nous avons laisse les plages en-touristees de Goa, et ici, nous sommes a peu pres les seuls non indiens en ville, et la poupulation le remarque aussi : de grands hellos, de poses photos, de grands sourires (edentes pour la plupart) et surtout beaucoup de regards curieux et, finalement, extremement bienveillants. (Encore, rien a voir avec le 9-3 !). Tiens, nous avons traverse cet am a pied une partie de la vieille ville, un coin qui doit ressembler aux halles de Paris au moyen-age (a part les hordes de camions Tata et autres vehicules a moteur enchevetres); eh bien, il nous a fallu prendre des photos a chaque echoppe -- surtout des echopes d'artisans - ferrailleurs et des grossistes en epices, fruits et legumes secs (dry goods) et les genre "forts des halles" tout petits et tout secs qui dechargent (et chargent ?) des rangees de camions Tata tous decores aux deites de l'Inde. (De vraies enluminures, ces camions Tata!) Tiens, j'aie essaye d'en soulever un de sac, et j'ai renonce pour ne pas refaire claquer ma hernie.

Nous avons deboule ici ce matin apres une autre rasade de train de nuit depuis Anjuna/Thivim, Goa. Arrives a la gare (isolee en pleine cambrousse a 17h pour prendre un train qui devait arriver a 18 h et qui finalement s'est pointe a ... 22H ! (Mais ca c'est grandement ameliore. Dans les annees70, c'etait du jour du passage du train dont onn n'etait jamais sur.) Mais c'est ca aussi les voyages : l'imprevu. Ah! s'assoupir a la belle etoile, sur une dalle de ciment, en regardant la lune, avec le boucan que font les insectes nocturnes dans les frondaisons avoisinantes et les chiens errants qui viennet faire ami-ami.... en attendant le train. Bref, apres un sixieme samosa et un dixieme chaii, ... et quelques rencontres sur le quai, le train finit toujours par arriver. Et la, il faut embarquer et trouver sa couchette en pleine nuit ... sans trop deranger les dormeurs deja installes. Mais en general pas de probleme dans ces classes "cheres" frequentees uniquement par les indiens aises et les touristes etrangers. Et puis on s'endort vite car on est creve; et on ne fait que des reves de train; enfin, moi, oui. Dans le train, je ne reve que d'etre dans le train. Les reves s'enchainent au gre des arrets et des departs, et du bercement du train. (J'ai meme reve un moment que le train roulait sur la mer, sans pont.)

Le but de cette escale au nord Kerala, c'est d'aller faire une excursion en foret vierge (rain forest) a 200 km d'ici a l'interieur du pays. J'en reparlerai dans un eventuel prochain mail. (Eh oui, je prefere aussi de loin la foret vierge au ski !)

Vous avez vu le coup qui est arrive a Hyderabad ? Encore un coup des islamo-pakos . En represaille evidemment de l'execution par l'Inde d'un de leurs barbus preferes et adules il y a une dizaine de jours. Une autre vision pessimiste : l'Inde et le Pakistan en viendront incessemment aux mains -- des mains en forme de champignon atomique. C'est inevitable. Et pourtant, en Inde, il y a tant de pauvres barbus frippes incultes mais pleins de sourires edentes et acceillant : ils ne doivent pas bien connaitre l'islam.... Ceux-la n'ont que la foi et la bonte du charbonnier, mais l'ambiance semble tendre vers la virulence. Le reve de Gandhi etait sans doute possible avec 400 millions d'habitants de l'epoque, plus maintenant avec un milliard de plus ! L'Inde me calme quand-meme car je peux parfois croire encore que la cohabitations des communautes religieuses est possible avec le sourire, meme irremediablement edente. Toutes les villes de l'Inde semblent encore vouloir le dire; comme ici, la rue a Calicut... Mais c'est toujours les partisans politiques de l'Oumma qui poussent a la roue, qui attisent, et ils y travaillent dur ici comme ailleurs, plus maintenant que jamais. Et ils reussiront.

[Rapide 424]

Car ce pessimisme est l'objet d'hommes mûrs, plutôt instruits et cultivés, qui observent avec colère ou dépit (un mélange des deux en fait) le délitement continu et accéléré des structures de la société "moderne". Délitement entrepris par ses élites mêmes! Une société qui, depuis la Renaissance, malgré ses tourments, ses errements, ses horreurs que le 20ème siècle a porté au paroxysme, a toujours été de l'avant dans le développement de la pensée, des arts et des techniques et qui semble aujourd'hui, à ces hommes que Jules Romains qualifiait "de bonne volonté", auxquels je me joins humblement, se précipiter vers sa fin. Et, lucides, ils enragent de ne rien pouvoir faire pour inverser la tendance.

Eh oui .... et, bien plus que ceux qui en veulent vraiment a leur existence, leur pire ennemi est l'optimisme tenace et beat de certains d'entre eux .. Malheureusement, il y en a plein les editoriaux de la bienpensance et les plateaux tele. Ce sont eux qui nous poussent vers la falaise !