un métier: cheminot

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Re: un métier: cheminot

Messagepar Undertaker
06 Nov 2015, 15:02

EC64 a écrit:aux Y32 des voitures Corail et au bogie FIAT des voitures VSE qui sont de très bons bogies.

Houla la la, malheureux !
Si tu avais bossé au 15 rue Traversière, face à Jacques Raison, et que tu parles de bogie "Fiat", tu aurais subi les foudres ! Il était, bien plus politiquement correct, de parler du bogie Y 270 pour désigner ce plagiat du bogie Y 32 (mieux encore, ne pas en parler du tout)....

2B.
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Re: un métier: cheminot

Messagepar Undertaker
06 Nov 2015, 15:17

Bonjour,

Pour compléter les informations données par EC64, j’ai téléphoné hier à mon grand copain Claude Sery avec lequel (lui aux bogies et moi aux caisses et structures) nous avons œuvré à la fantastique épopée de l’adaptation de la suspension pneumatique au TGV PSE. Pour rappel, les 107 rames TGV PSE sont sorties de construction avec des suspensions métalliques. Cette grande étude, ayant impliqué de nombreux techniciens et ingénieurs et dont la mise au point aura duré trois années, restera le plus beau et le plus exaltant souvenir de ma carrière de cheminot. Il en résultera un niveau de confort et de stabilité à très grande vitesse qui fait la renommée du TGV et qui, in fine, aura concerné plus de 700 rames TGV à travers le monde. Tout ceci, nous l’avons raconté dans le n° 187 de la revue Voies Ferrées.

Revenons à notre conversation et au bogie Y 207. Mr Mauzin, abondamment cité dans l’extrait de la revue AFAC était surtout un "essayeur", ce qui ne retire en rien à ses qualités d’ingénieur, à ses réalisations, à son expertise et aux recommandations qu’il a apportées au monde ferroviaire. Par contre, le bogie Y 207 est du à un concepteur, l’ingénieur SNCF Gaston Chalmel de la DEA (Division des Études d’Autorails). Claude, alors jeune dessinateur, en avait tracé le dessin d’ensemble. Les quatre bogies Y 207 ont été réalisés par les ateliers SNCF de Périgueux. Ils ont en outre été essayés sous des voitures DEV et sous une voiture TEE inox M69. Comme évoqué plus haut, la crainte de la rupture des consoles (pendants) "C" ont un peu freiné les destinées de ces bogies. Alors, Gaston Chalmel a persévéré dans le développement des bogies dont la suspension est assurée par des barres de torsion. Il avait ainsi développé le bogie Y 214 qui a équipé le turbotrain TGS. Cette fois-ci, il n’y avait plus de crainte des "C", puisque les longerons articulés reposent sur les boites d’essieux. Claude m’a confié que ces bogies étaient très souples et qu’on pouvait même soulever une des quatre roues de 150 mm alors que les trois autres restaient en contact avec les rails…




Mais c’était sans compter sur l’ingénieur Pierre Moron (orthographié à tort Pierre Morom dans Wikipédia) qui travaillait aussi sur les nouvelles générations de bogies au sein de la DEV (Division d’Études des Voitures). Il a conçu les prototypes des bogies Y 28 dont l’une des principales caractéristiques est l’introduction de la "boite à bras" articulée de la suspension primaire. Ces prototypes donneront naissance aux bogies Y 28 de série avec l’aboutissement du bogie Y 32. Le bogie Y 32 est une propriété de la SNCF et construit par les Établissements De Dietrich. A chaque bogie Y 32 exporté, le constructeur alsacien reversait des redevances à la SNCF. François Lacôte m’avait confié que ces sommes versées ont largement couvert les frais de développement de cette famille de bogies. C’est aussi en grande partie à Pierre Moron que l’on doit les voitures Corail (techniquement parlant s’entend !).

Claude a fini par me dire que le bogie Y 28 avait emporté le match sur le bogie Y 207 par ce que la DEV aurait mieux insonorisé la voiture testée sous son propre bogie que sous celui de la DEA : mais Claude est un ancien de la DEA, donc parfaitement intègre…
Toujours est-il qu'après le TGS, hormis les ETG qui ont reçu (prudemment) des bogies d’autorails à empattement plus grand pour mieux "tenir" le 160 km/h, tous les bogies suivants issus des études DETMT (ex-DEA) pour les RTG, XR 6000, X 2100/2200, etc. ont été des bogies avec boites à bras articulés du type développé par la DEV…

UTKR.
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Re: un métier: cheminot

Messagepar EC64
06 Nov 2015, 16:49

Comment FIAT a conçu son bogie Y270 s'il n'y a pas eu collaboration avec la SNCF ?

Pour revenir au bogie Y28, la même revue n°261 indique que ce bogie trouve son inspiration dans un prototype de 1949, le bogie Y18


Il n'est pas indiqué ce qui a fait préférer les Milwaukee (Y20 et suivant) à cet Y18, peut-être trop novateur.
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Re: un métier: cheminot

Messagepar Ferrovia
06 Nov 2015, 18:42

Bonsoir

Merci pour ce document intéressant. Le Y18 était en effet très en avance sur son temps.
Les seules différences notables avec un bogie moderne étant la timonerie de frein à l'ancienne et l'absence d'amortisseurs.

Aurais-tu aussi dans cette revue des infos sur le prototype Y 16 H?
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Re: un métier: cheminot

Messagepar Undertaker
06 Nov 2015, 18:54

EC64 a écrit:Comment FIAT a conçu son bogie Y270 s'il n'y a pas eu collaboration avec la SNCF ?

Ça, je ne dis pas le contraire ! Ce que je voulais dire, c'est qu'il m'est arrivé de prononcer le terme "bogie Fiat" et que je me suis fait retoquer avec un "non, le bogie Y 270"...(surement par un intégriste)

Bon, néanmoins ce bogie Y 270 (Fiat) n'avait pas le défaut de jeunesse de son grand frère l' Y 32, dont le logement (surnommé le pot de fleurs) du ressort de suspension secondaire était un nid à feuilles mortes et autres "cochonneries". Elles avaient pour effet de créer de la corrosion qui engendrait la rupture de la dernière spire du ressort au niveau de l'affutage. On disait que chaque voiture Corail avait en moyenne un ressort cassé sur quatre. Le problème a été résolu en ajoutant un soufflet d'étanchéité entourant le ressort de suspension.




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Re: un métier: cheminot

Messagepar BB63670
06 Nov 2015, 19:32

Ah ! Je découvre aujourd'hui l'utilité du soufflet sur les ressorts des bogies des corail !
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Re: un métier: cheminot

Messagepar EC64
06 Nov 2015, 19:54

Ferrovia a écrit:...
Aurais-tu aussi dans cette revue des infos sur le prototype Y 16 H?

Rien dans cette revue, mais un croquis


Ce bogie a été réalisé en 2 exemplaires par les ateliers de Nevers à partir des bogies Y16E.
Ils ont été montés sur la voiture 53105 par les ateliers de Villeneuve en décembre 1955.

Je ne sais pas et ne crois pas que l'on puisse faire un lien avec l'Y28 malgré le gros ressort.
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Re: un métier: cheminot

Messagepar X3876
06 Nov 2015, 20:12

EN 1996 j'ai été en formation (sur les EAD) aux ateliers du Mans. Je n'avais pas pris d'appareil photo, dommage, car dans les voies réservées aux vieilles ferrailles, j'y avais vu les Y 214 du TGS :shock:

Sinon la mise en place des soufflets autour des ressorts de suspension secondaire des Y32 a posé d'autres soucis en maintenance: comment détecter des ruptures de spires...Au gré des révisions ou de levage, il n'était pas rare d'"oublier" ces soufflets :siffle:
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Re: un métier: cheminot

Messagepar EC64
06 Nov 2015, 20:23

L'éternel problème du choix entre différents inconvénients et donc de la moins mauvaise solution !!
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Re: un métier: cheminot

Messagepar Ferrovia
06 Nov 2015, 20:58

EC64 a écrit:Je ne sais pas et ne crois pas que l'on puisse faire un lien avec l'Y28 malgré le gros ressort.

Non en effet, pas de lien direct. Il s'agit toujours d'un bogie Pennsylvania avec ses balanciers.
En fait, je n'avais jamais vu à quoi il ressemblait.

Il aurait pu être le chaînon manquant entre les Pennsylvania et les Milwaukee. Mais même chronologiquement, ça ne colle pas. D'après ce que disait le HS LT sur les DEV, ce Y16H a été testé alors que les DEV AO courtes des programmes U53 et + étaient déjà équipées de Y 20 D. Finalement, après essais (dont je ne connais pas la conclusion) la SNCF est revenue en arrière en mettant des Y 16 I bien plus classiques sous les DEV AO longues U56 à 59 (sauf les A9).

Le Y 20 n'a semble-t-il jamais vraiment donné satisfaction (problèmes de galop, la liaison entre balanciers et boites d'essieux posait peut-être aussi problème?). Le Y 24 ressemble d'ailleurs à un Y 20 amélioré (biellettes d'asservissement longitudinal alignées pour supprimer le galop, balanciers plus traditionnels).

Pour la famille des Y 28, il aura fallu attendre encore 10 ans de plus.
Le Y 28 (sans indice) avait, il me semble, des longerons très incurvés comme le Y 270 et très différents des bogies de série.
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