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2-1-5) La série 39
La série 39 ne comprend qu’un modèle de locomotive au type 1’D1’
2-1-5-1 Les locomotives de série 39 d’origine prussienne
2-1-5-1-1) Série 390-2 – anciennement pr. P10
Avec la P8 que nous venons d’aborder, les chemins de fer de l’état de Prusse disposaient en nombre suffisant d’une machine puissante et efficace pour le transport des voyageurs.
A condition que la vitesse ne soit pas supérieure à 75 km/h, elle était également utilisable en service express.
Cependant, la masse des trains tractés qui atteignait 550 à 600t (60 essieux) exigeait trop des machines. Et ce, tout particulièrement sur les lignes de moyenne montagne. Il était donc plus que nécessaire de disposer d’une nouvelle machine mieux adaptée.
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Initialement, on avait pensé allonger la P8 d’un essieu moteur accouplé pour en faire une 240 et la doter d’une nouvelle chaudière. Cependant, la chaudière étant placée entre les roues, son allongement ne pouvait se faire qu’au détriment de la surface de chauffe, ce qui aurait compromis la puissance disponible et modifié par trop le bilan économique de la locomotive.
Surélever la chaudière n’était pas possible sans modifier l’équilibre de la machine.
De ce fait, la transformation en catégorie 2’D, genre de construction qui plaisait à l’administration prussienne car elle permettait de faire l’économie d’un bissel supplémentaire, ne pouvait être envisagée.
Il fallait cependant disposer de quatre essieux moteurs accouplés pour obtenir, d’une part, l’adhérence recherchée et, d’autre part, maintenir le poids par essieu de la machine à 17t.
La distribution 1’D1’ utilisée sur la XX HV (BR190) avait fait ses preuves ainsi que l’entraînement Krauss-Helmholtz au fonctionnement impeccable à grande vitesse. Une reconstruction de la XX HV n’était cependant pas non plus une solution car le cahier des charges de la nouvelle machine – tracter des trains lourds en terrain vallonné – n’avait aucun avantage économique à tirer de la motorisation compound. De plus, en Prusse, l’utilisation de la vapeur surchauffée tenait la dragée haute à la technologie de la double expansion.
Dans tous les cas de figure, la conception d’une machine compound reviendrait plus cher que celle d’une locomotive à simple expansion. Une simplicité plus grande, un prix moins élevé, une meilleure économie de fonctionnement : voilà quels étaient les arguments en faveur d’une motorisation bicylindre.
L’on opta finalement pour une machine à trois cylindres entraînant ensemble le deuxième essieu accouplé, au bénéfice d’une meilleure répartition de la puissance, d’une pression moindre sur les pistons, d’un couple plus favorable et d’un gain de puissance au crochet. On acceptait en retour la complexité plus grande d’un entraînement interne.
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Borsig présentait le premier projet dès l’automne 1919, projet auquel allait prendre part un peu plus tard – de manière décisive – August Meier, directeur du bureau des uniformisations de la nouvelle DRG.
La fondation de la DRG allait d’ailleurs retarder la confirmation du projet car on procédait à une nouvelle évaluation du bien fondé éventuel de remettre en construction la XX HV plutôt que de construire la P10.
Le trop grand diamètre des roues de la XX HV pour le trafic local et son coût d’exploitation plus élevé tranchaient enfin une bonne fois pour toute en faveur de la machine 1’D1’ h3 de Borsig à qui l’on passait commande de dix locomotives dès 1921.
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Sous les numéros de fabrication 10999 et 11000, Borsig livrait en avril 1922 les deux premières machines (immatriculées 2810 et 2811 Elberfeld, aux normes KPEV) qui allaient être dévoilées pour l’exposition des techniques allemandes de Munich.
Initialement, dans le nouveau plan de numérotation de la DRG, les machines étaient destinées à devenir la série 17 ; à tel point que Borsig livrait les locomotives suivantes comme 17011 à 17022 et Henschel suivait avec les 17023 à 17030. A leur tour, les dix premières machines commandées étaient renumérotées 17001 à 17010. Ce n’est qu’à partir de 1925, avec le second plan de numérotation de la DRG, que la P10 recevait sa classification dans la série 39.
Ce sont au total 260 machines qui seront livrées jusqu’en 1927 par Borsig, Henschel, Linke-Hofmann, Krupp, Hanomag et MBG Karlsruhe. Conçue à la toute fin de l’époque 1, le BR39 est déjà une machine d’époque 2.
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Dans son cahier des charges, la P10 ou BR39 devait tracter 700t à 95 km/h sur le plat et la même charge à 30 km/h en rampe de 10‰.
Lors de la mise en service de la locomotive, la charge par essieu de 19t (au lieu des 17t prévues) se révéla d’abord problématique : les machines 39001 à 39005, déplacées de la Direction de Elberfeld à celle de Münster devaient assurer le service express à partir du dépôt d’Osnabrück sur la ligne de Cologne à Altona (Hambourg). Très rapidement, leur surcharge par essieu allait causer des dommages aux ponts et aux infrastructures de la voie.
Le même phénomène étant constaté sur ses autres lieux d’affectation (Karlsruhe, Francfort sur le Main, Erfurt, entre autres), les P10 se voyaient soumises jusqu’en 1925 à de nombreuses restrictions de circulation, jusqu’à rester garées froides pour certaines.
A partir de 1925, avec la mise progressive du réseau à 20t par essieu, elles prenaient enfin leur plein service rapide sur les lignes de moyenne montagne jusqu’à y être, à leur tout, peu à peu remplacées en service express par les BR01 nouvellement livrées.
Ce n’est que vers le milieu des années 30 que la P10 trouvera enfin sa véritable fonction de locomotive « P » pour trains régionaux rapides. Elle allait même se retrouver jusqu’en 1945 être la seule locomotive à assurer le service sur la ligne de Erfurt à Schweinfurt.
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La DR est-allemande allait, après guerre, faire subir à la BR39 une cure radicale en équipant 85 machines de nouveaux foyers dans le cadre de son programme de reconstruction. Les locomotives modifiées y deviendraient la série 22.
La DB quant à elle récupérait 154 machines qui assureraient le service voyageur rapide et express auprès des dépôts de Francfort sur le Main, Stuttgart, Karlsruhe, Cologne et Augsbourg. Par la directive du 15 juillet 1967, les dernières P10 de la DB étaient radiées. La BR 39184 construite par Linke-Hofmann-Busch a été préservée.
Catégorie : 1’D1’h3
Distribution : P46.19
Diamètre des roues motrices : 1750 mm
Vitesse maxi : 110 km/h
Fabricant : Borsig puis l’ensemble des usines allemandes
Première mise en service : 1922
Tender : pr.2’2’T31,5 avec 7t de charbon
Nombre total construit : 260
Nombre intégré à la DRG : 260
Numérotation : 39 001 à 39 260
Dates de dernière réforme : 1967